Strava : motivation ou piège ? L’impact des réseaux sociaux dans les sports d’endurance

Coach mental et Trail - impact Strava

Strava : motivation ou piège ? L’impact des réseaux sociaux dans les sports d’endurance


Les réseaux sociaux ont bouleversé notre manière de partager nos vies, et le sport n’y échappe pas. Strava, véritable « Facebook des sportifs », est devenu incontournable chez les coureurs, cyclistes et triathlètes. Il offre une communauté mondiale, des statistiques détaillées et une vitrine pour partager ses exploits. Mais cet outil numérique n’est pas neutre : il agit directement sur la motivation, les émotions et parfois même la santé mentale des sportifs.

Alors, Strava est-il un formidable levier de motivation ou un piège qui nous détourne du plaisir de courir ?

Strava, un allié pour la motivation et l’inspiration

Utiliser Strava, c’est avant tout rejoindre une immense communauté. Chaque sortie devient visible, saluée par des « kudos », et cette reconnaissance sociale stimule l’engagement. Dans les moments de doute ou lorsque la motivation flanche, recevoir ces encouragements peut suffire à remettre les chaussures de running. L’application agit comme un carburant social qui pousse à continuer. Elle est aussi une véritable source d’inspiration. Observer les séances d’amis, d’athlètes confirmés ou même de professionnels déclenche un effet d’entraînement. On découvre de nouveaux parcours, on apprend d’autres méthodes et, souvent, on se fixe des objectifs un peu plus ambitieux. Enfin, l’un des grands atouts de Strava réside dans la précision de son suivi : allure, fréquence cardiaque, puissance, segments… Autant de données qui, bien interprétées, renforcent le sentiment de maîtrise et d’autonomie dans l’entraînement.

Quand la comparaison sociale devient un piège

Mais l’envers du décor existe. Regarder les performances d’athlètes plus rapides peut parfois motiver, mais souvent cela engendre frustration, sentiment d’infériorité et baisse de confiance. La psychologie sociale parle alors de « comparaison ascendante ». Peu à peu, l’athlète perd de vue ses propres objectifs pour courir derrière ceux des autres. La préparation mentale insiste pourtant sur la nécessité de préserver le plaisir dans la pratique sportive. Lorsque chaque sortie est pensée pour « faire mieux que les autres », le sportif se coupe de sa motivation intrinsèque : courir pour soi, pour l’expérience, pour l’instant présent. Certains admettent même modifier leurs entraînements afin de « bien paraître sur Strava ». Résultat : surcharge, blessures, perte de plaisir et parfois démotivation totale. Le regard des autres finit par peser davantage que le ressenti intérieur.

L’obsession des chiffres : un risque pour le bien-être

L’essor des montres connectées et de Strava a installé une nouvelle logique : tout mesurer, tout contrôler. Kilomètres, allure, cadence, puissance… rien n’échappe aux capteurs. Si ces données peuvent être utiles pour progresser, leur accumulation risque de réduire l’expérience sportive à une suite de chiffres. Certains athlètes développent une véritable dépendance aux données : une sortie sans montre devient « inutile », car non enregistrée. Cette obsession peut générer stress, anxiété de performance et perte d’alignement entre plaisir, autonomie et progression. Même les professionnels ne sont pas épargnés : certains choisissent de masquer leurs séances pour échapper à la pression sociale et médiatique. Cela montre à quel point l’obsession statistique peut devenir pesante, quel que soit le niveau.

Se reconnecter à ses ressentis corporels

La préparation mentale rappelle l’importance de l’équilibre entre données externes et signaux internes. En se fiant uniquement aux chiffres, le sportif risque de se couper de son corps et d’ignorer ses sensations : fatigue, plaisir, douleur, enthousiasme. Or, l’entraînement optimal repose aussi sur la capacité à écouter son propre corps, à ralentir quand il le demande, à accélérer quand l’énergie est là. Les outils électroniques doivent rester des supports et non des maîtres. L’objectif est d’apprendre à les utiliser pour enrichir l’écoute de soi, pas pour s’en détacher.

Comment garder Strava comme un allié

La clé est de définir son rapport à l’outil. Utiliser Strava comme un journal personnel permet de suivre sa progression en se comparant à soi-même plutôt qu’aux autres. On peut aussi s’inspirer des parcours et des méthodes des autres sans les transformer en jugements négatifs sur ses propres performances. En préparation mentale, la fixation d’objectifs réalistes, adaptés à son contexte et à ses ressentis, reste un pilier central. Strava devient alors un soutien au service de la progression et non une contrainte qui enferme.

Exercice pratique de préparation mentale

Après votre prochaine sortie, prenez trente secondes avant de publier sur Strava. Fermez les yeux, respirez, puis demandez-vous : *« Qu’est-ce qui m’a procuré du plaisir aujourd’hui ? »* Conservez ce souvenir comme une ancre mentale. Ce petit rituel favorise la motivation intrinsèque et rappelle que la performance durable se construit d’abord dans le plaisir.

Strava est un formidable outil pour les sportifs d’endurance, capable de stimuler, d’inspirer et d’accompagner les progrès. Mais il peut aussi devenir une cage invisible faite de comparaisons, de chiffres et de pression sociale. La préparation mentale nous invite à retrouver l’équilibre entre plaisir, autonomie et performance. Strava doit rester un allié, jamais un maître.

« L’enfer, c’est les autres. » — Jean-Paul Sartre
Cette citation illustre parfaitement le poids que peut avoir le regard extérieur dans le sport, surtout lorsque l’on se définit à travers la comparaison. Elle rappelle l’importance de replacer le plaisir et le sens que l’on porte sur soi-même au centre de la pratique.

Laurent